PMA : le combat d’une femme pour l’information et la reconnaissance.

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Une bataille intime devenue engagement public

Il y a douze ans, France Dammel entamait un parcours de procréation médicalement assistée (PMA). Infirmière de formation, elle croyait être bien armée pour affronter ce long chemin qu’elle savait semé d’embûches. Mais bien vite, elle constate un manque criant d’informations fiables. Ce vide, elle tente de le combler en prenant des notes, sans savoir que celles-ci donneraient naissance à un livre, témoin de son engagement et de ses épreuves.

C’est en 2023, qu’un défi lancé par son fils, lors de la Foire du Livre, précipite son projet : « Et si tu revenais l’année prochaine, non plus comme visiteuse, mais en comme auteure ? » Ce pari, elle l’a relevé. C’est en prévision de la Foire du Livre de Bruxelles, à laquelle elle participe le dimanche 16 mars 2025, que nous l’avons rencontrée, livre en main, prête à témoigner et à transmettre.

L’Amour avant une solitude institutionnelle et sociale

France est amoureuse, mais son compagnon de l’époque, déjà père, après avoir hésité, finit par renoncer à un nouvel enfant. France, elle, persiste, loin de se laisser freiner, elle avance sur le chemin de la PMA.

Ce sera son chemin, malgré les obstacles, malgré les incompréhensions. Lorsque France débute son parcours de PMA, elle doit naviguer à vue. Si les forums regorgent d’informations hétéroclites, les ouvrages spécialisés se font rares. Côté francophone, aucune association de patientes n’existe, contrairement à la Flandre, mieux dotée. Mais l’obstacle le plus insidieux réside ailleurs : la perception sociale de son choix. Être une femme seule souhaitant un enfant est perçu comme un caprice. « Elle veut faire un bébé toute seule ? », entend-elle autour d’elle.

Des risques et des épreuves marquantes

Le parcours de PMA est loin d’être linéaire. L’un des moments les plus éprouvants pour France survient lors de sa première tentative : un syndrome d’hyperstimulation ovarienne l’envoie à l’hôpital. « Un syndrome qui, dans les cas les plus graves, peut être fatal », précise-t-elle. Aujourd’hui, les traitements ont évolué, réduisant ce risque, mais à l’époque, la peur et le doute s’immiscent dans son combat.

Et puis, il y a la douleur des échecs. Sur 25 tentatives, seule une aboutit à une grossesse menée à terme. À chaque cycle, l’attente, l’espoir, la chute. « Une insémination artificielle a un taux de réussite d’environ 15 % », rappelle-t-elle, soulignant la longueur et la dureté de ces parcours.

Un accompagnement médical à double tranchant

Dans les centres de PMA, les patientes sont censées pouvoir bénéficier d’un suivi psychologique. En théorie du moins, car en pratique, ces psychologues sont souvent perçus comme des juges, déterminant qui a droit ou non à l’assistance médicale à la procréation. « Les évaluations sont très différentes d’un centre à l’autre. J’ai appris récemment que par exemple, à l’UZ Brussel, une femme sur deux était recalée dès le formulaire initial », relève-t-elle.

De son côté, France Dammel a changé plusieurs fois de centre, car les besoins changent au cours d’un parcours aussi long. « Plus que dans d’autres spécialités, le rôle du médecin est aussi psychologique. Après dix échecs, on a besoin d’être encouragée. »

L’impact de la PMA sur la vie quotidienne

Un parcours de PMA ne se résume pas à des traitements médicaux : il bouleverse une vie entière. « Sur un mois, il faut parfois se rendre quatre ou cinq fois à l’hôpital », explique-t-elle. « La compatibilité avec une vie professionnelle, sociale et affective devient un défi quotidien ». C’est l’un des messages clés de son livre : informer les femmes sur cette réalité avant qu’elles ne s’engagent, même si pour France, elle ne regrette aucunement son parcours, ses deux fils sont une telle récompense, une incroyable source de joie.

Un plaidoyer pour une meilleure prise en charge

Si la Belgique est en avance sur d’autres pays en matière de PMA, tout n’est pas parfait. L’information manque, les tabous persistent. « Encore aujourd’hui, des amies me demandent des conseils pour leur fille, mais précisent que celle-ci ne doit pas être au courant », raconte-t-elle. Son livre se veut un outil de vulgarisation, une main tendue vers celles qui hésitent encore à se lancer.

Elle invite aussi les professionnels de santé à se plonger dans son récit. « Ils verront l’impact de ces traitements sur la vie des patientes, bien au-delà des consultations médicales. ». Certains centres proposent des échographies et prises de sang en soirée, mais ils se font rares. Les femmes en PMA doivent donc généralement pouvoir se libérer systématiquement en matinée, ce qui n’est pas toujours simple.

L’éducation des enfants issus de la PMA

Une question cruciale l’accompagne durant son premier parcours : « Comment aborder la question du père avec mon fils ? ». Une psychologue lui donne une clé essentielle : différencier « donneur » et « papa ». Très tôt, elle explique à son enfant que, faute d’amoureux, elle s’est tournée vers un hôpital où des hommes donnent leur « petite graine ». Une simplicité de langage qui a permis à son fils de grandir sans trouble identitaire. « Il n’a jamais cherché de figure paternelle », dit-elle.

L’avenir de la PMA et la congélation des ovocytes

Au fil des ans, les mentalités évoluent. « À la crèche, il y avait déjà deux autres mamans solos et un couple lesbien », note-t-elle, preuve que la diversité familiale évolue. Mais de grands combats restent à mener. Si les hôpitaux catholiques, qui refusaient autrefois les femmes seules, acceptent désormais ces patientes, certaines persistent dans des pratiques discriminantes. « Il faut être cohérent : si on dit qu’on accepte les femmes seules, il ne faut pas trouver toutes sortes de prétextes pour leur refuser l’accès », nous dit France.

Elle évoque aussi une évolution majeure : « Le Social Freezing », soit la congélation des ovocytes à des fins sociales. Cette pratique, permettant de préserver sa fertilité pour concevoir plus tard, pourrait alléger la pression pesant sur les femmes. « Mais il faut bien choisir le moment : trop tôt, ça n’a pas de sens ; trop tard, les chances de réussite diminuent. L’âge idéal se situe entre 31 et 36 ans. »

Un message aux médecins et aux femmes en devenir

France Dammel conclut avec un double appel. Aux femmes d’abord : « Si vous en avez l’envie, foncez ! Mais informez-vous bien et choisissez votre centre avec soin. ». Aux médecins ensuite : « Votre rôle va au-delà du médical. Chaque mot peut encourager ou décourager une patiente. Soyez présents, bienveillants et à l’écoute. »

En mars 2025, à la Foire du Livre de Bruxelles, elle espère voir non seulement des femmes et des couples en quête d’informations, mais aussi des soignants curieux de mieux comprendre l’expérience de leurs patientes. Son livre n’est pas qu’un témoignage, « C’est une invitation au dialogue et à une prise de conscience collective. », conclut-elle.

Trois questions à France Dammel

  • Pourquoi avez-vous décidé d’écrire ce livre ?

« Il y a douze ans, quand j’ai commencé mon parcours de PMA, j’ai constaté un vrai manque d’information. J’ai pris des notes, pensant qu’un jour elles pourraient servir. Aujourd’hui, après avoir eu mon dernier enfant, je vois que ce manque persiste malgré l’abondance de canaux d’information. C’était le moment d’écrire ce livre. »

  • Quel conseil donneriez-vous aux femmes qui souhaitent se lancer dans un parcours de PMA ?

« Si vous en avez l’envie, foncez ! Les options médicales sont nombreuses, mais l’âge reste un facteur déterminant. Il ne faut pas attendre 42 ans pour consulter, car la fertilité diminue significativement dès 35 ans. Il est aussi essentiel de bien choisir son centre et de s’entourer des bonnes personnes. »

  • Comment avez-vous expliqué l’absence de père à vos fils ?

« Une psychologue m’a conseillé de bien différencier “donneur” et “papa”. Dès son plus jeune âge, je lui ai dit : “Maman voulait un bébé, mais elle n’avait pas d’amoureux, alors elle est allée à l’hôpital où des messieurs donnent leur petite graine.” Il n’a jamais cherché de figure paternelle et comprend très bien son histoire. »

“Maman à tout prix. Patiente et gynécologue vous disent tout sur la PMA”
 
France Dammel & Christophe Blockeel
Éditions Racine 
ISBN : 2390253148
EAN : 9782390253143
Maman à tout prix
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